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 À fleur de pot

écrivainpoème d'hiver
Cassandre
Cassandre
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Mer 4 Aoû - 18:02

Aucun bruit, juste le silence, (et les quelques sons des gouttes dégoulinantes). Il n'y avait personne. Aujourd'hui n'était pas une journée pour sortir, pourtant, j'avais bravé la pluie pour te voir. Elle tombait depuis la nuit en fines particules d'eau. La terre était mouillée par les larmes versées, chutant avec grâce, chuchotant le malheur, roulant le long des joues et des pierres. Les arbres au feuillage d'été laissaient place à celui d'automne. Un feuillage coloré et pourtant si triste. J'aurais pu comparer mes sentiments aux feuilles emportées par le vent, ces feuilles mornes à l'opposé du printemps. Tristes.
Des herbes folles avaient poussé depuis la dernière fois que j'étais venue. Cela datait maintenant de deux semaines et cinq jours exactement. Le portail d'entrée donnait des signes de faiblesse. Il est probable que bientôt, on ne puisse plus le refermer. (s'il accepte de s'ouvrir une nouvelle fois). L'allée principale était toute chamboulée. Le sol devait avoir été victime du temps, lui aussi, et les rides nouvelles, creusées sur son visage, confirmaient mon hypothèse. Je te voyais déjà, à peine le portail passé. Tu étais presque à l'autre bout. Je devrai tout traverser. J'empruntais les chemins (enfin j'appelais "chemins" les morceaux de terres inexploités), et j'arrivais devant toi après de multiples virages et beaucoup d'enjambements. Nous étions réunies, face à face. Je m'étais préparée à cette rencontre. Je pensais pouvoir affronter la réalité des choses. Je pensais que je pourrais... Puis arrivée là, je voulais fuir. Te fuir, parce que je préférais me bercer dans mes illusions, me dire que tu rentrerais avec moi ce soir. Mais quand je te vois dans ce décor, je sais que tu ne rentreras pas. Tu m'as quittée. Tu me laisses, seule.


Les minutes s'écoulent. Le silence se fait pesant. Il en vient à m'entêter comme cette comptine que tu aimais fredonner et qui me plaisait tant. J'avais envie de te dire tout ce que j'avais sur le coeur mais je ne pouvais pas. J'en étais totalement incapable. Bloquée devant toi, bouche béante, je n'arrivais ni à sortir un son, ni à détacher mes yeux de toi. J'arrivais seulement à retenir mes larmes, mais j'aurais préféré les laisser couler. Tu me manques tellement. J'aurais voulu te le dire. Mes tentatives pour essayer de briser le silence étaient vaines. Je voulais parler de cette fameuse soirée où tu étais partie. Ce que tu m'as laissé, ce sont des mots amers, méticuleusement choisis pour me blesser. Tu me les as lancés au visage avec rage. J'aurais pu croire à une de nos disputes passagères même si tu pensais tes mots. Tu pensais chaque mot. Et ce que tu m'as dit a claqué dans ma tête en même temps que la porte. Depuis, l'écho de tes paroles se répercute souvent. Mais je ne t'en veux pas. Après tout, c'était comme ça entre nous. Nous étions fortes pour se lancer des paroles vexantes l'une à l'autre. Nous nous blessions, nous nous aimions. Le "nous" me paraît lointain aujourd'hui. Je t'aime et je t'ai blessée. J'aurais voulu que tout se passe comme d'habitude. J'espérais que tu rentres. Je pensais que tu reviendrais, tu revenais toujours. Pourtant, tu n'es jamais revenue.

Autour de nous il n'y avait que des gens comme toi et moi. Des infortunés, malheureux à cause de la vie cruelle que nous vivons. On aurait voulu un monde plus beau, plus heureux, où on aurait été avec ceux qu'on aime, pour toujours. Mais cet eldorado aux belles couleurs ne peut être que trompeur et nous ne pouvons demander l'impossible. J'étais rêveuse. Mais j'ai compris ce qu'avait réellement le sens de la vie, grâce à toi. Tu m'as ouvert les yeux. J'aurais préféré les garder fermés encore longtemps. J'aurais voulu que le temps s'arrête. Le temps, c'est le problème et le remède à tous les maux. Mon mal, c'est de ne pas avoir trouvé les mots momentanément pour te retenir, alors rien ne serait arrivé.

Le vent et la pluie se mêlaient. Je n'avais pas de veste et le froid que j'avais ressenti jusqu'alors s'était intensifié. Mon regard se porta sur les fleurs autour de toi. Certaines avaient bien tenu les périodes de sécheresse et de pluie, d'autres beaucoup moins. Tu étais belle lorsque tu regardais tes fleurs et quand tu riais aux éclats. Une fleur parmi les autres... Si seulement tu pouvais revenir…J'avais promis que je ne me laisserai pas aller. Je ne voulais pas pleurer, mais cette envie me rongeait et était plus forte que moi. Le bruissement des feuilles, les gouttes qui tombent, un silence de mort, un battement d'ailes, un battement de coeur, des larmes qui tombent, le sifflement dans mes oreilles, puis un bruit qui,  dans la naissance d'un moment, vint le faire disparaître. Des gens approchaient, parlant, un couple avec leurs enfants, deux petits garçons. Tu aurais dû savoir ce que je ressentais en les voyant. Enfin tu savais, tu savais toujours tout. J'aurais voulu qu'on soit comme eux, unies. Ils cherchaient un emplacement, sûrement même des gens. Un des petits garçons leva la tête et me fixa. Je devais offrir un spectacle distrayant avec mes cheveux mouillés, mes affaires trempées et mon air déconfit. Je me retournais vers toi. Il fallait que je parte avant qu’ils s'inquiètent. Je me penchais puis te caressais doucement la joue, humide et froide pour terminer par t'embrasser en retenant un sanglot long. Un adieu silencieux pour ne pas rompre cette atmosphère étrange qui planait. Les cloches sonnaient, il devait être dix heures, ou bien onze. Je sortis, repassant par l'allée sinueuse. Je pris mille précautions pour que le portail ne me reste pas entre les mains. Il paraissait tellement fragile. Je pris mon vélo laissé sur le parking. La pluie cessait de tomber. Rouler serait plus agréable pourtant j'aurais voulu que le ciel se déchaîne et me libère de mes entraves. J'aurais voulu rompre toutes les attaches pour ne plus souffrir. Peut- être qu'un jour, tout cela sera plus facile. Je jetais un dernier regard vers le portail et les gens engloutis avant d'appuyer sur ma pédale et de démarrer.

J'étais triste. J'essayais de regarder le paysage tout en pédalant. je me rappelais des beaux jours où elle était avec moi. Il faisait beau. Elle riait. On aimait bien faire du vélo ensemble. On s'amusait. Puis le temps est passé. Il a pris ton sourire. Il m’a volée notre bonheur. Il a gardé des secrets maintenant enfouis à jamais. Aujourd'hui je regrette. Je regrette tous les moments qu'on a pu gâcher. Je regrette de ne pas t’avoir vu mûrir. Je regrette de ne pas avoir été là pour te consoler. Entre nous les rôles étaient souvent inversés. Mais sans toi, je me sentais vide.

Le chemin que j'empruntais, je le connaissais par cœur. On le prenait souvent. Pour rentrer du collège ou juste pour se promener. Tous les chemins mènent à Rome mais avec nous c'était plutôt tous les chemins mènent à la maison. On avait toujours les mêmes endroits pour se retrouver. Toujours dans les mêmes décors. On était toujours toutes les deux. Ça nous plaisait tout ça. On aimait rire à pleine gorge. Ces rires vrais et intacts que seuls les enfants ont, comme si rien n'avait pu entacher cette beauté de naïveté. Les rayons de soleil nous caressaient la peau. Et quand il pleuvait comme aujourd'hui, on s'abritait sous un arbre et on écoutait les oiseaux qui cherchaient un endroit au sec. Les gouttes s'écrasant au sol en petite mélodie nous emportait dans un autre monde.

Je pédale et j'essaie d'oublier cette peine qui monte et m'envahie telle la marée qui arrive au galop. Mais je ne pouvais pas me laisser bercer par mes vagues à l'âme, je me serais noyée en m'oubliant, en oubliant la seule bouée qui était à deux brasses et que je ne pouvais atteindre.
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Cassandre
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Mer 4 Aoû - 18:07

Partie 1 – Automne

Chapitre 1
Pensée douce comme le jour,
Qui se lève lentement
Aux pétales fanés d’amour
Tu glisses en murmurant



Elle regardait le paysage par la fenêtre de sa chambre. Elle était intrigante cette adolescente. Elle semblait perdue dans ses pensées. Moi aussi j'aimais bien cela. Les pensées m'avaient toujours fasciné. Je les enviais. Enfin je n'étais pas vraiment là pour parler d’elles. Une chose m'avait frappé chez cette fille, comme un air de déjà vu, mais justement, je ne savais plus d'où. La belle à son balcon attendait que le prince vienne la sauver. Je n'étais pas un prince, mais je pouvais peut-être la sauver. Je ne voyais pas pourquoi le vent m'avait amené ici mais peut-être que je comprendrais bientôt pourquoi elle. Elle n'avait rien d'extraordinaire, rien de remarquable, rien d'inhabituel. Elle était juste une poupée ébréchée, écorchée par les épines de la vie florissante qui se dressaient devant elle. La fin de l'été s'annonçait et le soleil ne voulait pas caresser la princesse d'un rayon de lumière. Les ténèbres l'avaient engloutie comme moi bien avant. Mais je ne la laisserai pas seule. Je l'aiderai à surmonter tout cela. Elle pourra ressortir à la lumière et vivre enfin. Il faut qu'elle puisse me voir. Il le faut. Je lui dois la vérité.


De ma fenêtre je regardais les arbres bouger au rythme du vent. Je pouvais apercevoir les maisons un peu plus loin dans cette campagne qui m'a vue grandir. J'observais les oiseaux se poser sur les branches. Je ne savais pas pourquoi je me sentais aussi vide. Cela fera bientôt un mois que sa présence me manquait et je n'avais toujours pas pris l'habitude de ne plus la voir chaque jour. Mon téléphone vibra. Ignorant les appels, les messages, et autres moyens de communication courants, je me préservais d'afflux de regrets imminents chaque fois que je prononçais son nom. Éviter encore et encore pour me préserver. J'avais les nerfs à fleur de peau et j'étais prête à craquer. C'était Elle qui m'aidait, qui m'aimait. Je m'étais approchée de la fenêtre espérant voir une silhouette familière, n'importe qui, juste une personne qui me sauverait du monde dans lequel je m'étais enfermée. Elle était morte et je devais m'y résoudre. Morte. Je ne supporte pas ce mot. La mort entraine la fin d'un être et je ne veux pas que tout se termine. Je ne veux pas de fin, ni précipitée ni irréfléchie. Je n’aime pas ces fins. Elle était tout pour moi. Il me restait tellement de choses à lui dire, tellement de choses à partager. Aujourd’hui, il ne me restait que les regrets et l’amertume. Mon téléphone vibra une nouvelle fois. La plupart du temps je laissais mon portable en silencieux pour ne plus supporter son bruit. J'aime le calme. J'aime entendre le vent dans les feuilles des arbres, secouant les branches. Alors entendre le vibreur de mon téléphone s'activer toutes les deux minutes, très peu pour moi. Mais presque contre mon gré je me suis vu saisir cet objet connecté qui rend les adolescents fous, et j'ai lu les messages que Damien, un ami, si ce n'est le meilleur, m'adressaient de manière insistante. Il me disait qu'il fallait qu'on parle. Il s'inquiétait. Quoi de plus normal quand on décide d'ignorer quelqu'un ? J'avais pourtant été claire : je ne voulais plus parler à quiconque. Elle me manquait et je ne voulais pas de leurs mots de réconfort qui n'auraient fait qu'accentuer ma honte et ma détresse. Je commençais à me noyer sans Elle mais je ne voulais pas d'une autre bouée. Elle m'avait toujours protégée. Aujourd'hui je devais nager seule. J’avais mal. Je ne m’en remettrais pas. Le temps aidera. Il aide toujours à calmer la peine. Cependant rien ne pourrait calmer ma peine. À peine si je pouvais dire son prénom sans sentir les larmes monter. J’étais simplement lasse de ce monde sans sa lumière. Mon téléphone s’allume. Damien m’appelle. Je ne voulais pas parler, c’était mon droit. Laisse-moi ! Laissez-moi ! Partez, tous ! Sortez de ma vie. Je veux tout oublier, ne plus penser. Je ne veux plus me souvenir, cela fait trop mal. Je veux juste rester seule. Il n’y a que toute seule que je m’en remettrai.
Pourquoi ne descend-elle pas ? Elle ne me voit pas ? Pourquoi ? Dites-moi ce qui se passe. Je ne me souviens pas qui elle est. Je veux lui demander où je l’ai vue. Qui est-ce ?

Je ne sais plus qui je suis. J’ai perdu ma moitié. Damien insiste. Il est gentil mais tête de mule. Je décroche enfin, pour mieux lui raccrocher au nez. Il m’a laissé 3 messages vocaux, cela suffit. Il faut qu’il comprenne. Je ne veux personne autour de moi. Qu’ils disparaissent tous !

Qui est-ce ?

Qui suis-je sans Elle ?

(à méditer)Damien s’accroche. Il ne veut pas la laisser sombrer. Il voudrait lui dire qu’il sera toujours là pour elle. Il aimerait qu’elle soit heureuse. Il était amoureux l’an passé, mais il n’avait pas saisi sa chance avec elle. Elle était si… Étrange, charmante, drôle, terre à terre. Il avait voulu l’impressionner en se proposant comme pompier volontaire. Il en était fier de l’uniforme. Elle ne l’avait jamais regardé. Chloé le regardait, elle par-contre. Ils étaient proches tous les quatre : Chloé, Iris, XXX et lui. Ils connaissaient les jumelles depuis le lycée, Iris depuis la maternelle. Aujourd’hui leur groupe avait besoin d’aide, d’un souffle nouveau qui les plongerait dans un nouveau décor. Après le lycée, ça c’était compliqué. Les jumelles étaient séparées à l’université, l’une en médecine, l’autre en sciences de la vie et de la terre. Iris était partie, comme lui en prépas. Ils ne parlaient plus beaucoup. Leur relation s’était distendue, essoufflée, plutôt égrainée avec toutes ces nouvelles rencontres. Quand cette nuit-là il avait été bipé, il n’aurait jamais pensé qu’il allait devoir faire définitivement ses adieux à ses amies.
Damien avait laissé un huitième message, sans succès. Il ne lui restait plus qu’aller chez elle pour lui dire le fond de sa pensée.
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Cassandre
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Mer 4 Aoû - 18:15

Bribes de texte

1. alternatif
Sur les photographies, elle pouvait voir Daphné. Il ne restait plus que ça à Anthéa. Elle ne se souvenait déjà plus de son visage. Elle n’aurait pu décrire Daphné même en faisant un effort. C’était impossible de parler d’elle sans pleurer. L’émotion était encore trop violente. Anthéa, allongée sur son lit, regarde la fenêtre qui lui fait face. Le vent souffle et frappe les volets. Elle aurait voulu dormir pour passer le temps. Elle voulait le fuir juste pour quelques instants. Son esprit tourmenté avait besoin de repos. Ses pensées tortueuses la ramenaient sans cesse à Daphné. Elles avaient tout partagé quand elles étaient enfants mais depuis quelques années, elles n’étaient plus les mêmes. Grandir ne fait pas toujours du bien. Malgré leurs différends, elles s’aimaient. Les photographies étaient toutes dans des albums qui couvraient le sol et les meubles de la chambre. Si la porte avait été ouverte, personne n’aurait pu rentrer tellement il y en avait.
Nous étions en septembre et l’année scolaire avait débuté depuis une dizaine de jours. Anthéa venait de faire ses débuts dans les études supérieures. Elle avait réussi les sélections pour entrer en prépa de biologie mais à cause de l’accident, elle a modifié ses plans. Attendant une place à l’université, elle reste dans sa chambre. Elle imagine la vie qu’elle aurait dû avoir. Mais soudain son téléphone retentit. C’est encore XXX qui essaie de la joindre.

--> prénoms à revoir

2.La lune brillait dans un silence suspendu au soupir de la nuit. Les arbres endormis laissaient aux animaux la forêt toute entière. À quelques pas surgit une silhouette aux airs apeurés. Elle courait à tout rompre, surtout le silence. Derrière elle, une seconde ombre passa.


Anthéa courait, courant comme jamais, voulant se raccrocher à la vision qu'elle venait d'avoir. Il fallait qu'elle l'atteigne, pour savoir. Elle aurait préféré cette course avec le soleil comme guide mais ce soir elle devait suivre une ombre parmi bien d'autres. Chloé était là, presque à porté de main… Le souffle court, elle ne pouvait abandonner son espoir de la voir encore une fois, même si cela devait être un rêve, elle espérait que peut être… La première silhouette traversa sans encombres l'orée de la forêt tandis qu'Anthéa la poursuivant, trébuchait, à bout de souffle, à bout de forces, à bout de nerf. Elle tapa son pied contre une racine et tomba si lourdement cette fois ci qu'elle su que tout n'était qu'une illusion. Elle se voilait la face depuis des mois. Jamais elle ne renverrait Chloé. Pourtant, allongée dans l'herbe humide du petit bois, protégée par les feuillages noirs des arbres monstrueux, cauchemars de la nuit, elle lu à travers la terre. Chloé était réelle. Chloé l'attendait. Alors elle se releva, la cheville douloureuse, mais tenu bon. La nuit ne faisait que commencer et elle avait jusqu'à l'aurore pour la retrouver. Elle avança et tout à coup, son cœur fit un bond. Les feuilles s'écartèrent et le ciel apparu enfin, laissant à Anthéa la plaine noircie par les cendres. Et caressée par la lune, un seul arbre au milieu des ruines se dressait, encore vivant. Il était jeune et, on ne savait par quelle grâce, il avait pu survivre. Cet arbrisseau était un laurier, arbre préféré de Chloé. Mue par son instinct, la belle éplorée se dirigea vers ce laurier et laissa sa peine à la nuit. Allongée près de l'arbre, regardant les étoiles et le ciel dégagé, elle se souvint.


Chloé et elle venaient souvent dans cette forêt. Une nuit pareille à celle ci, Chloé lui dit qu'elle l'aimait et que rien ne les séparerait jamais. Elle ne pouvait pas se douter qu'un an après, elle mourrait dans un incendie. Ce fut quand l'accident arriva qu'Anthea fut enfermée dans les flammes de son enfer, construit pour échapper à la peur de la solitude. La nuit était sa délivrance. Les flammes si hautes habituellement abritaient sa haine et sa rancœur contre le destin cruel qu'on lui avait concocté. Elle ne pourrait plus aimer comme elle l'avait fait. Elle s'était perdue dans sa chambre, comme ce soir dans cette forêt, chaque soir après ce drame qui avait emporté la seule personne qui la comprenait. Elle avait écouté les oiseaux quand sa tristesse était grande et elle avait pleuré. Alors quand le soir, la fatigue l'emporte sur la tristesse, quand les flammes ardentes ne sont plus que colonnes fumantes, Anthéa se berce d'illusions et pleure. La nuit était son seul véritable jardin ou ses désirs semblaient prendre racines.


Dans la nuit douce, le silence vient de se rompre. Le vent souffle et une nouvelle bouleversante traverse la forêt. Les habitants du monde, cachés par leur première apparence, sortent de l'ombre. Tous se rassemblent auprès de l'endormie malheureuse. Elle est apaisée par un rêve doux. Anthea est enfin calme et Chloé lui caresse les cheveux.

NOTE : Daphné = Chloé

3.
Tout près de la forêt vivait un vieux couple. Deux cœurs n’ayant jamais perdu l’amour acquis au premier jour. Lui s’appelait Phillipe (Philémon) et elle, Béatrice ? (Baucis). Ils aimaient bien me recevoir diner, je ne sais pourquoi, mais je crois que ma compagnie leur rappelait le temps de leur jeunesse. Avec Chloé, nous y allions souvent. Nous les avions rencontrés par hasard, un jour de pluie. Nous étions alors dans la forêt, Chloé et moi, à jouer à trouver les nymphes cachées entre les arbres, lorsque les gouttes se mirent à tomber. Les feuillages épais n’empêchaient pas l’eau de passer et nous étions trempées. Nous nous sommes précipitées vers l’orée de la forêt où nous avions vu un petit lotissement. Ce petit amoncellement de maisons étaient notre espoir de ne pas finir congelées et malades. Nous avons tapé à presque toutes les portes mais aucune n’avait ouvert pour nous accueillir. Désespérées, nous avons frappé à la plus petite de toutes ces maisons. Elle semblait ancienne, un sérieux besoin d’être rafraichie mais elle tenait debout malgré l’impression qu’elle allait s’envoler au moindre coup de vent. Chloé a pris son courage à deux mains et a frappé. La maison était dite « hantée ». Une vieille rumeur disait qu’on entendait les pas des morts dans la forêt et que cette maison abritait leurs fantômes. Chaque nuit, les fantômes sortaient de la maison pour parcourir la forêt qu’ils protégeaient, et chaque matin, ils revenaient s’enfermer dans cette maison pour ne sortir qu’au soleil couchant. De quoi donner la chair de poule à l’enfant de 5 ans à peine que j’étais. La porte s’ouvrit et Chloé et moi nous engouffrions à toute vitesse. Enfin j’ai surtout suivi Chloé qui était plus grande… Les monstres auxquels je m’attendais n’étaient en réalité que deux. Et ce n’étaient pas des monstres. Ceux qui nous ouvrirent leur porte étaient deux personnes d’une soixantaine d’années, que je n’avais encore jamais vu dans le coin. Ils nous offrirent le couvert et ils allumèrent le chauffage électrique pour faire sécher nos manteaux et nous réchauffer. Lui, était grand, un peu tassé mais grand tout de même. Il portait une chemise verte à carreaux bleu et ocre, à la mode des bucherons. Il affichait un grand sourire laissant apparaitre une étincelle dans son regard brun. Ses mains bronzées et ses ongles abimés laissaient penser qu’il travaillait sûrement la terre. Elle, semblait être habituée aux tâches de la maison. Ses mains, délavées par les produits d’entretien, étaient d’une grande finesse. Elle avait des doigts très fins et des mains minuscules par rapport à celles de son mari. Lorsque j’osais regarder son visage, une étrange sensation de douceur me parcourait le corps. J’aurai aimé qu’elle me prenne dans ses bras et qu’elle m’entoure de son sourire réconfortant, avec son regard bleu lumineux et sa chevelure blonde rayonnante, transperçant les plus gros nuages sur mon cœur. La peur m’avait envahie mais lorsque je vis ces êtres chaleureux, lui comme un feu de cheminée, elle comme le soleil, elle s’envola soudain pour ne laisser la place qu’à la curiosité. « Je m’appelle Béatrice et mon mari Phillipe. Et vous jeunes demoiselles ? », nous demanda t elle. Chloé pris la parole pour nous deux et donna nos prénoms. Elle expliqua que nous venions de la forêt. Elle alla jusqu’à affirmer que nos parents savaient où nous étions, mais ceci était un mensonge puisque nous nous étions enfuies en prétextant aller nous promener. Il n’était pas rare de nous voir toutes les deux gambader le long des chemins et nos parents étaient d’accord pour nous laisser un peu de liberté à condition de ne pas aller trop loin. Mais avec Chloé, nous ne savions pas ce que signifiait « trop loin »… Phillipe avait bien compris notre petit manège mais il ne fit rien. Il nous proposa un jus d’orange et des gâteaux. Personnellement, je l’ai beaucoup aimé tout de suite, j’irai même jusqu’à dire que les gâteaux n’y sont pour aucune raison et qu’en aucune façon ils auraient joué une part à cette étrange amitié naissante entre deux petites filles et deux jeunes retraités en quête d’air pur, de campagne.
Ce couple avait vécu en ville pendant des années avant de venir s’installer dans notre petite commune. Ici, ils avaient emménagé dans cette maison à rénover, pleine de potentiel, avec un voisinage âgé. Ils y avaient vécu une dizaine d’années, ayant connu mille et un problèmes. Puis ils avaient pris leur retraite. Tour à tour, leurs voisins disparurent, soit placés en maison de retraite, soit partis, soit morts. Et bien entendu, peu habitués aux retraités aux horaires de nuits, les gens se sont mis à parler, à inventer des histoires et à fuir ces gens originaux. Chloé et moi après notre première rencontre avec eux, avions décidé d’établir notre quartier général de chasse aux fées, elfes, nymphes ou encore gardiens de la forêt, dans cette maison, avec comme nouvelles recrues Phillipe et Béatrice. Le temps était passé et il s’en était passé des choses. Une année, l’eau de la rivière à débordé et l’inondation est arrivée aux portes de la demeure. Toutes les maisons aux alentours on prit l’eau, exceptée celle de Béatrice et Phillipe. C’était le plus grand choc dans mon existence que je n’avais jamais vécu. Toutes les maisons furent refaites ensuite, mais la seule qui resta toujours ce qu’elle fut autrefois, était celle de mes protecteurs.
Aujourd’hui, j’allais pour une énième fois chez mon couple préféré prendre un verre de jus de fruit. Parler avec eux me remontait le moral. Pourtant je ressentais le vide que Chloé avait laissé au fond de moi, emportant avec elle une grande partie de mes souvenirs. Peut-être qu’oublier faisait partie de la vie, mais à quoi se raccrocher quand les souvenirs disparaissent presque entièrement ? Comme si Béatrice avait pu sentir mes tourments ou lire dans mes pensées, elle sortit de sa maison, prit une clé et se dirigea vers moi. La clé, je la connaissais bien. J’avais eu l’interdiction d’y toucher pendant des années. Cette clé si précieuse, ouvrait la cave ainsi que l’atelier de Phillipe. Son « atelier » était en réalité une pièce vaste, juxtaposée à la cave, où les deux amoureux entreposaient leurs photographies. On aurait pu appeler ça une chambre noire. Dans les albums, je trouverai peut-être la réponse que j’attendais. Pourquoi oubliais-je les bons moments de mon passé pour ne garder que les regrets ? Pourquoi voyais-je sans cesse son ombre partout où je me rendais ? Pourquoi la douleur ne pouvait-elle pas s’éteindre ?

4.
L’amour me pousse à écrire

Je ne prends pas la plume sans envie. Les chagrins m’aident. Ils donnent au vent la puissance de mes colères. Ils donnent aux mots l’amplitude qui me manque.

5.
Quand on pense que tout est fini, que l’on s’est remis, il n’en est rien. On le pense, mais il suffit d’un tout petit évènement pour tout déclencher. Tout remonte à la surface. Des corps, des visages qui se sont amoncelés là, dans le fond de votre tête. Ils remontent, emportant les regrets avec eux. Tout remonte. Tous remontent. Je repense aux bons moments mais le sourire ne me reviendra pas. Les larmes viennent. Je ne peux pas les contrôler.


L’espoir n’est qu’illusion, mais il nous fait tenir. Sans espoir, la vie serait triste. Elle m’a fait tenir pour mon chiot. J’ai espéré qu’il s’en sorte. J’ai voulu y croire, même si je savais qu’il n’y avait rien à faire, qu’elle était condamnée. Je savais que ce n’était pas de ma faute mais je me suis torturée quand même, car je regrettais d’avoir pris certaines décisions. Je me sentais coupable de sa mort. Je me pensais coupable de son sort, de son mal-être grandissant.

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